L’Eglise Adventiste aux Antilles une Eglise normative (II) (03.07.2009)
Enfin, la deuxième partie de cette note. Malgré les difficultés techniques du blog là voilà. Dans la première partie nous notions que l'adventisme au Antilles insiste sur l'affirmation des normes et laisse moins de place à une réflexion sur les dites normes. Une simple lecture des revues et une écoute des prêches permettent de s'en rendre compte. D'ailleurs les adventistes antillais qui ont séjournés en France notent ce décalage. Quel en sont les effets ?
L'adventisme antillais s'oppose par quelques-unes de ses valeurs, à des traits de la société antillaise. Il ne faut pas voir là un conflit, mais plutôt une tension constitutive du dynamisme religieux antillais. Simplement disons que cette tension n'est pas uniquement du fait de l'adventisme. Il est une construction entre la société globale et l'Eglise Adventiste. Par ses valeurs l'adventisme (et l'ensemble des églises chrétiennes) rappelle et alimente un idéal éthique, moral, religieux à toute la société antillaise. Il paraît cohérent d'affirmer que cet idéal ne s'oppose en rien aux valeurs de probité de la société antillaise. Certainement, cette fonction de rappel, d'affichage de la bonne moralité est une fonction plus générale du religieux. D'ailleurs, combien sont ceux qui restent toujours émerveillés par la capacité des membres d'un groupe religieux à être cohérent avec les idéaux qu'ils se donnent. Là est un effet voulu. En se présentant comme un groupe où le rigorisme est important, l'adventisme se présente comme un espace social de « virtuoses ascétiques ». Mais la contre partie de cela est socialement un phénomène que j'appelle « l'inquisition latente et permanente ». Qu'est-ce ? C'est simplement le revers de la médaille. En se présentant comme un groupe où les membres sont (ou devraient être) des modèles de probité, l'ensemble du corps social ne manque pas de souligner les éventuelles incohérences des membres dans leurs attitudes. Rappelez-vous, Bergson présente le rire comme une sanction sociale. Mais c'est le cas aux Antilles où l'adventisme est pris dans son souci d'être une organisation exemplaire moralement. Regardons cela de prêt. Dès qu'un adventiste connait dans sa vie privée des difficultés ou dans ses engagements sociaux, ceux qui l'entourent ne manquent pas de lui rappeler qu'il est en opposition avec les valeurs qu'il véhicule. Problème de fidélité dans le couple, ivresse, détournement de fonds, violence, etc. dès que cela est du à un adventisme la réprobation sociale est plus forte. Tout se passe comme si l'ensemble du corps social est heureuse de rappeler à l'adventisme qu'il est lui aussi, composé d'individus. Il faut dire, qu'en se présentant comme un groupe de virtuoses ascétique, les antillais, surtout non religieux, ont l'impression d'un snobisme religieux. Les adventistes se considéreraient comme des hommes meilleurs, moralement. Alors la joie de pointer toute incohérence est perceptible facilement. Dans les communautés adventistes cela n'est pas sans conséquence. On cherche a toujours délester le groupe du membre source de disgrâce social ! Un pasteur me disait que le plus important dans un tel cas de figure est de démontrer à la société que l'Eglise condamne plus vigoureusement l'attitude immorale. De fait, non seulement l'adventisme est perçu socialement comme un espace d'interdits, il est aussi considéré comme un groupe qui ne supporte pas la déviance en son sein. On peut même dire que c'est le piège de la tendance à l'élitisme. Pour l'adventiste déviant, l'Eglise adventiste antillaise n'assume son rôle de soutien. Elle l'est idéal, mais concrètement la sanction qui souvent peut être une radiation (perte du statut de membre par vote public) pose question. Le soutien attendu n'est pas perçu chez ceux qu'ils côtoyaient en permanence. Le premier message est l'exclusion et éventuellement un soutien a posteriori.
Là aussi est une différence avec l'adventisme hexagonal. L'acceptation en France que les normes soient discutées entraîne l'acceptation d'une pluralité de comportement. Evidemment ceux-ci doivent rester dans le cadre que se fixe le groupe. Mais ce cadre n'est pas vécu comme figé. Les individus sont considérés comme des acteurs de la vie sociale et des membres qui comme tous les concitoyens ont des difficultés identiques. Le souci de l'adventisme hexagonal est d'être avant tout un support, un accompagnant, un aidant de l'adventiste qui peut se mettre en marge des normes du groupe. La logique de sanction n'est pas un préalable. Elle intervient in fine si l'individu déviant ne manifeste pas le souhait d'avoir une ascèse conforme aux normes adventistes. Ce n'est pas un préalable pédagogique comme dans l'adventisme antillais.
15:18 Écrit par fades | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : antilles, adventiste, adventisme | | Facebook
Commentaires
J'apprécie votre réflexion mais résumé ainsi l'adventisme antillais ceci est faux car celà à vraiment évolué mais certains principe reste en place et ceci la société l'impose car lorsque quelqu'un commet un crime il est condamné pour lorsque qu'un individu a accepté de suivre une religion il ne peut respecter les règles, voilà la question, nous ne voulons pas suivre les principes donné et ceci ce voit dans la société chaque tout le monde veut faire sa loi sur le principe de la liberté.
Écrit par : Charles | 10.09.2009
Monsieur,
Puis-je vous suggérer de lire les travaux de Raymond Massé ( depuis 1977 à nos jours) et de Véronique Poulin sur l'Eglise adventiste aux antilles françaises, en Martinique en particulier. "Détresses créoles; ethnoépidémiologie de le détresse psychique en Martinique", me semble aussi être une bonne référence. J'aurai l'opportunité de vous opposer quelques objections fondamentales. Votre analyse me semble bien superficielle et, de toute façon...conditionnée idéologiquement: vous me semblez être un "adventiste convaincu".
Écrit par : Ralph Valleray | 03.09.2010
Bonjour M. R Valleray,
Je connais très bien les travaux que vous suggérez. Avec R. Massé j'ai ZU la possibilité d'échanger sur mes travaux et les siens. Notez que le présent blog est une vulgarisation et n'a pas pour fonction de défendre l'adventisme. Il s'appuie sur une vision non victimaire des individus et s'éloigne de la notion de manipulation ou d'analyses psychopathologiques, voire sociopathiques.
Concernant les dérives internes aux groupes, y compris adventistes, je ne les approches pas comme une propriété intrinsèque de l'adventisme.
Pour ce qui est du conditionnement psychologique de mon analyse, j'apprécie l'argument. Vous arrivez en effet à qualifier mes intentions et aptitudes sans me connaître. Je vous suggère de lire à ce sujet le PV de soutenance de mon jury de thèse de doctorat sur l'adventisme. Le titre : "Approche sociologique d'un groupe religieux minoritaire - L'Eglise Adventiste dans le Nord de la France". Vous serriez surpris visiblement! Psychologue, anthropologue, sociologue de la cognition, présents dans le jury, ont eu une vision bien loin de la votre. Mais certainement votre opinion est la meilleure.
Autre chose, l'"adventiste convaincu" que je suis:
1. n'est pas membre de la SDA,
2. publie dans la Revue Adventiste,
3. vient de rédiger un article pour Conscience et Liberté,
4. réalise des articles scientifiques sur l'adventisme qui sont très critiqués par des adventistes.
5. S'intéresse au lien entre antillanité et adventisme
Voilà qui complexifie le tableau et ne manquera pas d'attirer vos critiques.
Écrit par : Fabrice Desplan | 03.09.2010
"Monsieur", c'est moi ou l'auteur du blog ?... Merci.
Lui il n'est pas adventiste et moi oui. ALors l'adventiste convaincu, c'est moi ?
En parlant de choses que vous voulez indiquer, faites vous allusion à votre vécu dont vous témoignez dans votre livre
Écrit par : Charles | 03.09.2010
Je découvre ce matin 7 mai votre réponse car, je ne visite pas souvent votre blog qui n'est pas sans intérêt !
Peut-être aviez vous remarqué que j'avais écrit, "SEMBLEZ être un adventiste convaincu": je n'étais donc pas catégorique. D'autre part, en faisant référence à Massé et Poulin, j'indiquais déjà ainsi que je n'étais point du genre à considérer mon opinion comme étant la meilleure ! C'est tout.
Écrit par : Ralph Valleray | 07.05.2011
Mr Valleray,
Sans établir un dialogue et pour clore, je suis surpris de votre délais de réaction de 8 mois ! D'autre part, je remarque que vous tronquez votre propre citation. Vous écriviez sans me connaître:
"Votre analyse me semble bien superficielle et, de toute façon...conditionnée idéologiquement: vous me semblez être un "adventiste convaincu".
Conditionné idéologiquement ? Je ne me rappelle pas avoir été sur votre canapé pour une analyse psychiatrique!
Il me semble que vous devez faire des efforts de communication surtout quand il s'agit de rentrer en contact avec quelqu'un que vous ne connaissez pas.
J'ai parfaitement suivi votre litige avec l'Eglise adventiste en Martinique. Il est certainement en toile de fond. Ne voulant pas faire de ce blog un prolongement polémique d'une affaire où la justice se prononce je clos les commentaires de cette note.
D'autre part, je n'ai aucune obligation à publier vos commentaires comme vous le souhaitiez par insistance si je pense qu'ils ne respectent pas la charte de l'hébergeur ou l'orientation éthique de ce blog. De plus les contraintes techniques imposent un temps dans la publication des commentaires.
Je vous rappelle que le présent blog s'éloigne d'une analyse passionnelle de l'adventisme pour un regard à partir des sciences sociales dont la sociologie et l'anthropologie.
Cordialement.
Écrit par : Fabrice Desplan | 12.05.2011