Ces églises Afro-Antillaises qui se multiplient (21.04.2006)
Dans le religieux moderne tel qu'il se donne à observer en France, les dernières années sont marquées par l'émergence de communautés qualifiées "d'ethniques". Il s'agit simplement de groupes dont les individus ont en commun des origines en plus de la même pratique cultuelle. Parfois ces groupes échangent dans leurs langues maternelles. L'essentiel de ces communautés sont protestantes et Afro-Antillaises. Voilà un phénomène intéressant.
De ce constat nous pouvons donc conclure que c'est l'aspect Afro-antillais de ce phénomène, qui suscite l'interrogation et parfois la suspicion. D'ailleurs les portugais, espagnols ou polonais, ont avec moins d'acuité du faire face aux mêmes interrogations. Cependant, contrairement à des fantasmes collectifs, les études montrent que ces groupes facilitent la vie sociale de ses membres. Ces derniers y retrouvent les ressources nécessaires pour rentrer pleinement dans une citoyenneté. En poussant la réflexion sur la base des entretiens réalisés avec ces derniers, nous nous apercevons que - paradoxalement pour un jacobiniste intégriste - le religieux protestant ethnique est le ressort qui permet à ces membres de jouer le jeu de la laïcité. Voilà qui lance le débat sachant qu'en arrière plan se pose la question de la place du religieux dans les sociétés Afro-Antillaise, en comparaison à l'espace qui est réservé à la question religieuse en France.
12:40 Écrit par fades | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : Sciences Humaines, Sociologie, Nègre | | Facebook
Commentaires
très intéressant ton blog, Fabrice, viens me voir de temps en temps.
à+
jean paul
Écrit par : arlequin | 23.04.2006
très intéressant ton blog,Fabrice,à+
jean paul
Écrit par : arlequin | 23.04.2006
J'ai une conception très "laïcarde" de la religion... chacun dans son domaine, notamment à l'école (sans doute nourrie aussi par ma formation juridique où l'histoire n'est jamais absente). Mais en même temps ouverte et tolérante... (lire et relire Voltaire ! ), intéressée autant par les apports philosophiques divers, l'histoire des religions (Marcel Mauss, Mircea Eliade, Bottéro et quelques autres) j'ai tendance à suivre l'enseignement de Spinoza du tractus théologico-politique : si quelque chose de la religion est contraire à la raison, ne suivre que la raison... ce qui ne veut pas dire qu'il n'existe pas des choses que l'on ne puisse expliquer... croire et penser restent deux démarches distinctes.
Mais je me méfie des dérives sectaires (sans parler de la scientologie ou du criminel "Temple solaire") et les élucubrations des charismatiques (qui'ils soient protestants ou cathos), le "parler en langues", etc... me laissent indifférentes.
Grave question : faut-il des églises ethniques ? La raison me paraît assez évidente : les églises installées sont repliées sur leurs ouailles et sans doute racistes.
Je suis pour l'ouverture, le dialogue et le partage. Je viens de lire une très belle interview de Lilian Thuram dans le Monde... Je pense depuis longtemps (un docu de Canal + sur "les Bleus" et la Coupe du Monde) que c'est quelqu'un qui a autant de "fond" que de vraie modestie et le sens des vraies valeurs, sans doute le plus attachant de cette équipe victorieuse.
Écrit par : kamizole | 24.04.2006
ok pour l'opinion sur L. Thuram. En ce qui concerne la religion, la première chose à faire c'est de distinguer les rapports individuels à la spiritualité et les formes institutionnelles que cela prend à travers les âges et les types de sociétés! ça te va???
jean paul
Écrit par : arlequin | 24.04.2006
Jean Paul,
Je ne manque pas de lire tes alerquinades. Continues. A+
Écrit par : Fades | 29.04.2006
Kamizole,
Désolé pour le temps de réaction ! Il dénote simplement une surcharge d’activités. J’ai lu avec attention ta remarque, qui finalement pose la question du "repli identitaire". Le risque est de se poser des questions auxquelles nous serions incapables de répondre : Est-ce le repli identitaire qui fait que les individus forment des églises ethniques, ou est-ce le mythe de l’intégration totale, qui force au repli identitaire ? Evidemment l’un et l’autre. Ce que je note par exemple chez les adventistes du 7ème jour qui sont fortement composés d’antillais, c’est que se retrouver entre personnes originaires des Antilles, a pour avantage de permettre à nombres d’adventistes de mobiliser les ressources nécessaires (cognitives, relationnelles, économiques…) pour jouer le jeu de la république. De plus, me semble t-il que dans les groupes religieux minoritaires, beaucoup d’individus sont attachés à la laïcité. Mais, il faut noter, et là est un point important, que ces groupements, sont comme l’ensemble de notre société, traversés par des opinions différentes. On y trouve des laïcards, mais aussi des communautaristes au sens négatif du terme (ou sens médiatique). Ainsi à côté de ceux qui font du religieux un outil citoyen républicain, d’autres en font uniquement un outil de revendication identitaire. Quand on regarde ces groupes à partir des relations sociales que développent les individus en son sein, remarquons que les individus instrumentalisent leurs croyances. Certains acceptent, stratégiquement d’être circonscrits à leur identité, alors que d’autres ambitionnent une ouverture vers d’autres différences, quitte à braver l’enferment communautaire. Quoi qu’il en soit dans le religieux minoritaire les individus sont souvent pris entre tentation de "repli" et désire d’ouverture. Toutefois s’il y a un "repli", on ne peut pas parler de racisme car tous ces groupes désirent s’encrer dans le paysage religieux français en touchant les autochtones. La décommunautarisation est une perspective qui marque également l’équilibre difficile entre ouverture et rassemblement communautaire, au sens noble cette fois-ci.
Écrit par : Fades | 29.04.2006
Fades,
Je suis encore plus en retard... mais j'ai le souvenir de mes années de jeunesse à la JOC ou des copains se demandaient très sérieusement si l'on pouvait partager la spiritualité dans des églises "normales" de la même façon qu'on le faisait entre nous, c'est à dire grosso modo entre jeunes travailleurs plutôt à gauche (en tous cas à Orléans et ensuite à Paris). Mais je pense que cela nous structurait quelque part, nous intégrait aussi dans la société par le biais du syndicalisme ou de l'engagement. Mais c'est une autre époque, il y avait des mouvements de jeunes qu'ils soient politiques, religieux - j'avais aussi des contacts avec des jeunes ruraux, en province on est moins coupé de la campagne - ou tout simplement laïcs qui malgré leurs différences structuraient et cultivaient la jeunesse et le monde du travail. Sans oublier la dimension humaniste très forte (je parle pour la JOC). Quelque chose qui porte à aimer les gens.
Écrit par : kamizole | 27.08.2006
Que dire de plus. Cette période dont tu fais allusion avait des perspectives nobles comme celles que tu notes. J'ai interviewé un ex de la JOC, engagé politiquement, et qui me parlait également de la mixité sociale qui faisait la noblesse de le Jeunesse Ouvrière. Espérons que le défit de la mixité ethnique sera franchi pour un beau vivre ensemble. Mais là le religieux n'est qu'un élément, très important et dynamique, d'une question de société qui interpelle bien au delà. Et là, il me semble qu'il y a beaucoup de pas à faire encore, tout en notant une évolution tout à fait intéressante... En effet au moins maintenant on se pose la question du statut des minorités, ce qui est nouveau. A voir les réponses qui seront faites.
Écrit par : Fades | 02.09.2006