Dans une récente note sur son blog Sébastien Fath met en exergue les erreurs du regard de l’administration Bush sur le religieux. Il note que le président américain ne maîtrise pas l’histoire religieuse de son pays et a une vision erronée du rapport de Lincoln au religieux, alors qu’il prétend s’inspirer de ce dernier. Reprenant un récent article critique du Washington post, Fath met en évidence ces deux manquements de G. Bush Junior tout en notant que le président américain surfait sur la réhabilitation dans la société américaine des valeurs (religieuses) conservatrices. C’est sur ce premier point que note Fath, que je vous propose de glisser. Plus précisément, regardons une illustration de la politique de santé et de développement économique des pays pauvres de la Maison Blanche à partir d’une dépêche de l’AFP passée anonymement.
Selon l’AFP " les Etats Unis ont fait un don de 15 millions de dollars (12 millions d'euros) à une coalition d'organisations religieuses prônant notamment l'abstinence pour lutter contre le sida en Ouganda. La coopération américaine (USAID) a octroyé cette subvention pour les trois prochaines années au conseil inter-religieux d'Ouganda (IRCU), qui regroupe des organisations membres de l'Eglise catholique ougandaise, du Conseil suprême musulman, de l'Eglise anglicane, de l'Eglise orthodoxe et de l'église adventiste du septième jour.
En regardant la composition de l’IRCU, on s’aperçoit qu’il n’est pas évident d’affirmer que la présidence américaine a une vision du Monde simpliste. Quand elle veut elle sait intégrer dans son approche du Monde une complexité tout en voguant sur un populisme. L’IRCU regroupe des groupes religieux qui ont de grandes divergences. D’un président qui se présente comme un militant protestant acharné du bien, on est en droit d’être surpris de la présence de groupes non protestants, mais surtout de l’Islam ! Alors fou le Busch de financer une structure où l’Islam est partie prenante ? Certainement le fait que "L'IRCU a notamment pour objectif de promouvoir l'abstinence jusqu'au mariage et la fidélité au sein du couple" a contribué à l’obtention de cette subvention américaine. Mais se contenter de cet argument c’est tomber dans le piège populiste de Bush, qui sait que l’IRCU regroupe "40% des services de santé en Ouganda". Alors pas si fou que cela le Busch. Derrière une décision qui peut être vue comme fondamentaliste et idéologique (elle l’est mais pas uniquement) il y a un souci d’efficacité. En effet non seulement l’IRCU touche une grande partie de la population Ougandaise, mais elle est en contact essentiellement avec les individus qui échappent à tous les systèmes de soins. De fait, c’est un acteur incontournable dans la prévention du SIDA.
Le président américain d’un côté donne des signes à son électorat, dans la dynamique du retour aux valeurs religieuses, mais doit aussi dans la même logique démontrer à ce même électorat son efficacité (quasi missiologique) dans le rapport aux pays en développement. De fait son choix de financer l’IRCU semble répondre à son cahier des charges, même si cela se fait au détriment d’autres organisations qui ont d’autres valeurs et une efficacité reconnue dans la lutte contre le SIDA.