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Ce que j’ai dit à Marianne.

medium_MArianne_COmpresse.jpgIl est vraiment intéressant de participer au dossier d’un magazine surtout quand ce dernier a pour objet les Antilles. En ce sens dans Marianne 517 daté du 17 au 23 mars il est résumé un entretien que j’ai donné à une journaliste. Cependant, les 45mn de tête à tête à la gare du Nord le 11 février 2007 ont été trop sommairement présentées. Réajustons ce qui est dit à la page 61 très simplement :

Premièrement concernant les chiffres ; en France il y a plus de 13 000 adventistes dont officiellement 30% sont antillais. Si on compte les antillais en prenant en compte deux générations on arrive à 60 % du total des adventistes.
D’autre part, je ne disais aucunement que les antillais sont victimes de racisme où de ségrégation. C’est la plus incongrue des formules qui ne peut qu’attirer votre courroux si vous connaissez l’adventisme. J’indiquais à la journaliste que la forte proportion d’antillais disparaît dans les lieux décisionnels de la hiérarchie adventiste. Ce n’est qu’un aspect de la problématique antillaise dans l’adventisme hexagonal.
Un autre phénomène où la problématique ethnique (antillaise surtout) revient est la répartition géographique. Dans la Région parisienne il y a en effet des lieux à forte dominante, voire avec un quasi exclusivisme antillais. D’autres espaces se distinguent par une concentration de la population autochtone, COMPARATIVEMENT, aux autres églises adventistes de la Région Parisienne. Outre la lecture ethnique, il y a là superposition d’une problématique sociale et économique. C’est l’ensemble de ces éléments, économique et sociaux qui agissent de concert et semblent avoir une résonnance ethnique. Cependant il ne faut pas nier que même dans un groupe religieux comme l’Eglise Adventiste des autochtones lisent en terme de menace la forte présence et progression antillaise. Mais il s’agit de la traduction d’une ignorance sur les particularités antillaises et sur le religieux hexagonal. Il y a là une sacrée différence avec ce que vous pouvez lire dans Marianne.
Un dernier point. Le mot "quimboiseur" n’existe pas dans mon vocabulaire pour diverses raisons. Tel est également le cas également du mot "métropole" appliqué à la France par rapport aux Antilles. Surtout dans une interview je ne les utilise pas. Qu’est-ce que je disais qui a pu laisser employer le mot de quimboiseur ? Simplement, qu’en enquêtant sur les pratiques religieuses antillaises dans l’adventisme, constatons qu’elles restent marquées par leur origine afro antillaise. L’une des illustrations demeure le fait que des adventistes, des évangélistes, des catholiques antillais, continuent, dans la discrétion de leurs frères et sœurs religieux à fréquenter les individus qui ont un rôle particulier dans le religieux afro antillais. Ici peut se glisser l’exemple du quimboiseur.
Voilà rapidement redressées quelques approximations du magazine.

Commentaires

  • Pourquoi ne pas écrire directement au journaliste de Marianne si vos propos ne sont pas justes ? Se justifier sur votre blog n'est pas suffisant car les lecteurs de Marianne ne sont pas ceux de votre blog. Un droit de réponse à la presse reste nécessaire pour rétablir la vérité des faits.

  • C'est fait, j'ai recontacté Sylvie C. Ceci dit il s'agit de précision ici et pas de justification.
    Dans un contexte non soumis aux contingences de la presse, celui de la journée de recherche du 3 Mai 2007 au GSRL nous parlerons de l'Adventisme au regard posé de la recherche. C'est mieux ainsi. Si vous saviez le nombre d'interview que je repousse par mois sur l'Eglise Adventiste ?

  • Bonjour

    En lisant simplement l'article de marianne, je ne voyais pas où vous vouliez en venir. Mais en lisant votre blog, réajustant les propos, je suis rassuré et j'apprécie votre enquête car elle reflète la vérité tout simplement.
    Je suis moi même adventiste et ne puis que confirmer.
    Vous avez bien fait de mettre les pendules à l'heure sur votre blog même si ce n'est pas par la voie de la presse.
    Bon courage à vous
    Jean-Yves

  • BOn tout est clair ici. La seule question que je me pose, pourquoi les adventistes réagissent uniquement quand la parole d'un chercheur est instrumentalisé à leur détriment. Je n'ai jamais vu un de nos responsables d'église, ici porté un commentaire qui encourage. Seul celui de Collonge sur Ellen White participe à ce blog. Mais pourquoi ? J'aimerai bien avoir une réponse.
    Jean Yves, c'est cool ce que tu avances. Dommage que tu ne sois pas un responsable adventiste.

  • La presse à une fâcheuse tendance à déformer (adapter) les propos, l'article est souvent "orienté" à l'avance. Le tout est de savoir si il existe une problématique antillaise dans le milieux adventiste, ou pas. le fait de poser la question est déjà un grand pas.

    Je laisse les chercheurs comme vous, en définir les limites et explications.

  • Je trouve que c'est déjà intéressant que l'on puisse parler d'aventisme dans un journal comme Mariane, surtout qu'habituellement le sujet est souvent lié dans la presse au débat sur les sectes en France. Même si l'article a été quelque peu déformé, il n'en demeure pas moins vrai que cet article n'a pas donné une image "négative" de ce culte.

  • En lisant votre réaction dans votre blog à propos de ce que vous avez dit à Marianne, je suis en partie rassuré sur la perspicacité de vos analyses.
    Il y a cependant un certain nombre d'erreurs rapportées sur l'histoire de l'adventisme aux Antilles qui peuvent fausser vos analyses sociologiques. Ce n'est pas forcément de votre faute car je reconnais que les ouvrages sur le sujet sont rares.
    L'adventisme aux Antilles a démarré en 1914 et non pas après la seconde guerre mondiale comme je l'ai lu dans Marianne. Le premier missionnaire était originaire du Guyana (Philip Giddings). Il n'y a pas eu non plus une "arrivée massive d'Américains" contrairement à ce que Marianne prétend.
    Je vous renvoie au livre très documenté "L'adventisme à la Martinique" (Carib Edipress, 2003, 320 pages) que j'ai écrit lors de mes études de théologie à l'université adventiste Andrews. J'ai consulté de nombreuses sources de première main et j'ai interrogé des pionniers du mouvement adventiste aux Antilles.
    Votre démarche, qui consiste à étudier l'adventisme, est plutôt rare en France. Je tiens à vous en remercier et je voudrais vous encourager pour votre intérêt.

    Jean-Luc

  • Et dire que cet ouvrage fut indiqué à Sylvie Clerfeuille avec ceux qui sont présents en bibliographie ! Je me rappelle très bien avoir fait le lien avec l'histoire d'autres groupes religieux protestants qui ne sont pas arrivés aux Antilles par des missionnaires. Toute personne ayant suivi une simple activité J.A dans une église adventiste aux Antilles sait l'apport de locaux dans l'émergence de l'adventisme. J'ai encore en tête les pages de l'ouvrage de Sergio Moctezuma "Allez, faites des disciples" qui montre bien l'importance des colporteurs dans l'Union des Caraïbes (chapitre 12). Surtout que je ne suis pas historien. Je ne peux d'ailleurs que me référer à de tels travaux, même si là aussi ils sont trop peu. Pour ces apports, merci à vous. Ah... nos chers journalistes.

  • L'allusion à la fréquentation "d'individus qui jouent un rôle particulier dans le religieux afro-antillais" par des adventistes est un peu vague et mériterait une élaboration plus précise.

    S'il s'agit de contacts occultes, des chercheurs (métropolitains entre autre ?) ont peut-être fait ce raccourci facile par rapport à l'ensemble de la population. Mais sur le plan de la rigueur scientifique sociologique, cette déduction est surprenante.

    Dans l'espace confiné des Antilles, ça se saurait. Aucun phénomène pareil (même dans la discrétion) ne passe inaperçu et ne manque d'éveiller l'attention et les rapports malveillants. Les gens font rarement état d'un comportement tendancieux d'adventistes dans ce domaine. Ceçi m'incline à penser que cette pratique est rare parmi les adventistes.

  • Désolé pour le temps de réaction.
    Vous avez raison d'indiquer qu'il faudrait préciser le propos comme ne le permet pas des espaces assez généraliste comme celui-ci sur l'Eglise Adventiste.
    Pour répondre directement, notez que le travail ici concerne avant tout l'adventisme en France, dont l'adventisme antillais en France. Il va donc de soit que la généralisation ne doit pas être réalisée. C'est une évidence qu'il faut, comme vous l'invitez à le faire, noter.
    Toutefois, je ne crois pas qu'il faille lire des différences d'appréciation en terme de "chercheurs métropolitains" ou autres. C'est faire preuve d'anthropocentrisme renversé.
    Pour ce qui est concrètement de la relation d'individus antillais membres de groupes religieux considérés de la France comme minoritaires et protestants avec les gadèts zafès, sorciers locaux, etc., c'est un fait qui existe, mais qui n'est pas homogène. Ne voyons pas là simplement des gens qui ont une double activité religieuse. C'est un cas mineur, mais plus largement une ascèse marquée par l'héritage afro-antillais. Il faudrait être plus précis là aussi.
    En 2004, avec Raymond Massé, lors d'un échange partant sur les politiques de santé à l'université de Lille III, nous constations en aparté cette évidence. Lui sur le terrain antillais et moi sur le terrain hexagonal. A titre d'exemple j'ai enregistré une vingtaine d'entretiens (non représentatif d'une globalité) d'adventistes qui indiquent après conversion toujours avoir des pratiques (diverses plus ou moins marquées dans une discrétion) occultes.
    Evidemment même dans un espace confiné il ne faut pas s'attendre à une proclamation individuelle ou collective d'une pratique proscrite par le groupe. Mais je note de nouveau qu'il s'agit d'une marginalité à l'échelle des milliers d'adventistes (Cf. les radiations ou départs liés aux pratiques magico-religieuses aux Antilles).
    Ce qui parait plus pertinent que ces faits, doit encore de mon avis être étudié. Il s'agit de l'impact de l'héritage religieux afro antillais proscrit par le groupe, dans l'ascèse des individus. Là je creuse aussi l'une des anciennes hypothèses de R. Massé. En effet, dans les pratiques d'antillais (encore une fois pas tous) ont trouve des pratiques qui tendraient à faire penser aux injonctions qui sont faites aux sorciers ou autres "Gadèts Zafès", "Menti mentè". A Paris par exemple j'ai réalisé une ethnographie d'une demande de désenvoutement (dans un langage d'imposition des mains, donc confus) voulant faire du pasteur adventiste, plus un acteur du religieux hérité d'Afrique qu'un berger du protestantisme. Nous retrouvons fort bien dans ces cas une exigence sociale au pasteur, qui l'enferme d'ailleurs dans une pratique qu'il récuse parfois, ou au mieux quand il est sensible à la complexité du croire antillais, ne veut pas y être réduit.
    D'autre part, dans une analyse de type réseau, c'est-à-dire qui mettrait en lien les interconnexions sociales des individus, ont se rend compte (Cf. Fabrice Desplan, 2005b) que les individus qui ont des pratiques magico-religieuses dans l'adventisme sont certes marginaux, mais souvent se connaissent. L'effet réseau a entre autre pour conséquence d'expliquer le secret.
    Bref, beaucoup de chose à étudier dans cette marginalité qui n'est pas le propre de l'adventisme. Voilà qui conduit à noter qu'il ne s'agit pas de donner une image fausse de l'adventisme. On est dans des comportements individuels sporadiques. Je suis même de ceux qui dirait que l'on ne se trouve plus dans l'adventisme, mais dans une sorte de syncrétisme individuel, qui traduit encore l'un des effets de l'ultramodernité (J. P. Willaime).
    Mais que retenir de cela, que l'on partage ou pas cette analyse: Le religieux antillais en France (et aux Antilles) est un espace de recompositions et de dynamismes. Les mouvements religieux d'origine protestante passe dans la culture antillaise par le prisme de l'héritage culturel.

  • Ma réaction est motivée par la perception de l'article de Marianne qui laissait entendre que les pratiques magico-religieuses discrêtes sont courantes chez les adventistes antillais.

    Nulle doute que la journaliste a peut-être entendue ce qu'elle voulait entendre. Il y a cette facheuse tendance journalistique à grossir le trait et à chercher le détail croustillant.

    Nous sommes d'accord: la pratique occulte est sporadique parmi les adventistes, y compris parmi les Antillais en France. C'est très différent. J'y vois plusieurs raisons:

    1. L'adventiste sait que les pratiques magiques et occultes sont contraires à sa foi et qu'elles lui sont incompatibles.
    2. L'adventisme soutient une foi éclairée qui rejette toutes les formes de supertitions.
    3. Le mouvement charismatique (qui pourrait parfois être un cheval de Troie pour certaines pratiques) n'existe pas dans l'adventisme.
    4. Historiquement, l'Eglise adventiste aux Antilles et ailleurs a été très ferme contre ces pratiques.

    Cependant, les adventistes ne nient pas l'existence du diable, des démons et du mal qu'ils causent sur terre - ni des interventions surnaturelles de Dieu. Occasionellement, il arrive qu'ils prient ou imposent les mains pour la délivrance de quelqu'un qui se trouve sous l'emprise d'une force malveillante. Ceci présuppose une préparation spirituelle car on a affaire à des forces hostiles.

    De là à dire qu'il s'agit d'un héritage afro-antillais est un pas que je ne franchirais pas. Jésus et les apôtres ont pratiqué des exorcismes. Aucun historien ou théologien sérieux attribue leurs exorcismes aux pratiques magico-religieuses de l'Afrique.

  • Vous avez raison de noter ces précisions. J'irai même plus loin concernant le point "4" en disant que l'adventisme antillais aux Antilles a manifesté une véritable hostilité face à ces pratiques.
    Cependant un point de désaccord demeure et à lui seul justifierait un échange soutenu. En effet, je suis enclin à penser que dans "la manière", l'ascèse antillaise il y a des surgeons, des héritages afro antillais. Si je devais généraliser, pour prendre en compte votre remarque à contextualiser concernant le croissant fertile avec Jésus (les nouvelles approches théologiques venant d'Israël - et plus anciennes - prennent bien en compte le contexte et l'héritage socio-historique de l'époque du Christ sans discriminer le Texte), je dirai que les pratiques, y compris magico-religieuses, antillaises sont marquées par un héritage culturel dense, dont les pratiques issues d'Afrique. JP Laurent qui travaille sur le Burkina Faso m'indiquais d'étonnantes similitudes entre mes observations et des pratiques, légendes, croyances Burkinabais. Il ne faut pas voir là une filiation qui serait certainement imaginaire, mais n'y a t-il pas là l'un des pistes historico-sociologique (non théologique). S'ajoute évidement d'autres qui justifient d'ailleurs le concept même de Créolité (à considérer qu'il s'agisse d'un concept). Brefs, des pistes (il faudrait rajouter l'influence de théologies), avec pour moi une préférence sur des liens avec le magico-religieux hérité. Mais ce n'est pas la seule. A ce titre je suis avide de précisions ou d'informations, pouvant confirmer, infirmer, compléter ou discréditer. C'est le bonheur de la recherche ! Pour l'heure, en regardant les réactions d'africains, en lisant les mythes, et surtout en voyant les congruences historiques je reste sur ma position de départ. Mais encore une fois elle n'est pas immuable et ce point particulièrement j'ai envie de lire ou avoir d'autres informations de votre part par exemple. Ceci dit s'il y a une évidence pour le sociologue c'est bien l'influence du milieu et de sa traversée historique. Faudrait-il encore ne pas fabriquer le deuxième et le constater.
    Avec mes remerciements

  • D'abord une clarification utile. Contrairement à une idée très répandue, la théologie - biblique - s'appuie sur la réalité et non sur une construction métaphorique ou mythique. Cela veut dire que la Bible rapporte des évènements historiques qui se sont vraiment produits. Elle parle de personnages qui ont vraiment existé.

    Des fouilles archéologiques ont prouvé la véracité de milliers de noms, de lieux, de peuples, d'évènements ou de civilisations qui pendant des sciècles avaient été mis en doute par des savants parce qu'ils n'étaient connus que par la Bible. D'ailleurs grâce à la Bible, de nombreuses recherches et découvertes furent réalisées (souvent dans le but de contredire le texte biblique - c'est le contraire qui se produisit).

    De ce fait, le théologien ne dissocie pas le texte de son contexte historique. La Bible est ancrée dans l'histoire. C'est même ce qui fait sa spécifité par rapport à tous les autres écrits sacrés.

    La théologie diffère des sciences humaines seulement sur un point: elle prend en compte une réalité "élargie", c'est-à-dire spirituelle (Dieu, les anges, le diable, etc). Comme les sciences humaines acceptent la réalité sur un plan purement matérialiste, elles ne peuvent pas en parler. Il en ressort que les gens religieux ressentent souvent qu'elles ne peuvent pas expliquer la totalité de leur expérience.

    Venons-en à la question de l'apport afro-antillais dans la pratique religieuse adventiste. Nous butons sur plusieurs problêmes pour identifier une origine noire:

    1. Dans toutes les religions et dans toutes les cultures, les gens prient. Parfois les formes sont similaires, parfois elles sont différentes.
    2. L'exorcisme est pratiqué dans beaucoup de religions et de cultures.
    3. L'imposition des mains est une pratique que l'on retrouve dans de nombreuses religions et cultures.

    Qu'est-ce qu'on peut conclure? Une explication historico-théologique serait:

    1. Prier est un phénomène universel.
    2. L'occasionnelle emprise satanique semble aussi être un problême universel.
    3. Toutes les religions ont tenté à leur manière de résoudre ce problême - parfois avec certaines similarités dans les formes.

    Y-a-t'il sur "la manière" comme vous dites une source typiquement africaine? Je me le demande.

    Une telle réponse, j'en suis certain, ne conviens peut-être pas au sociologue. C'est un problème (que vous aviez déjà pressenti).

  • Pour le sociologue l'approche de la théologie que vous décrivez est une évidence. Le théologien que je suis avant d'être sociologue (chronologiquement) ne peut qu'affirmer. D'autre part, les constats anthropologiques universels que vous faites sont aussi des généralités qui interpellent. L'ouvrage de Pascal Boyer "Et l'homme créa les dieux" est une tentative (certes évolutionniste) de poser des jalons cognitifs pour répondre à la question.
    Les généralités que vous énoncez ne conduisent pourtant pas à occulter les spécificités nègres, antillaises, polonaises, suédoises ou autres ! Pour le sociologue le constat universel est une donnée et non une fin. En ce sens le gout pour les études empiriques ne vise qu'à porter un autre angle de réponse permettant de mettre en évidence les enrichissements sociaux, culturels des individus à leurs pratiques religieuses.
    S'il est un élément socio-anthropologique certain, c'est que les ascèses diffèrent, se spécifient en fonction de l'univers social (historique, idéologique, économique, culturel...). Ne pas considérer donc qu'il y aurait une spécificité dans l'expression religieuse antillaise dans son origine africaine (pas uniquement) tenterait à discréditer toutes les recherches en sciences humaines. Pourtant nombres sont réalisées par des individus ayant un regard positif, voire de croyants.
    L'étude sur les liens entre Créolité et protestantisme antillais en Région parisienne de Girondin, le regard de Migerel, les enquêtes de Massé, l'approche en termes de patterns (même très critiquée), les enquêtes qualitatives comme je le réalise, démontrent au moins toutes une chose: l'héritage culturel antillais avec sa dimension africaine (même limitée) influence ladite "manière". JP Bastian dans son étude sur le Pentecôtisme au Brésil indique également le même phénomène. D'ailleurs, plus généralement, le constat de l'influence du milieu est également dressé par l'archéologie biblique. Pour avoir moi même pratiqué cette discipline au Musée de l'Homme comme stagiaire certes, cela me semble une certitude.
    Toutes les études sur les groupes religieux millénaristes messianiques dans les sociétés post-esclavagistes dénotent l'influence du dense héritage et brassage culturel dans les expressions religieuses. Ceci pour vous dire aussi en passant que les sciences sociales et humaines prennent tout à fait en compte ce que vous appelez une "réalité élargie". C'est d'ailleurs la base de toute étude sur le fait religieux. Le contraire est resté à l'âge de pierre des sciences humaines !
    Cette parenthèse fermée, à la lumière des colossales études, rationnellement (au sens de Weber, donc sans opposition avec une croyance) rien ne permet de penser que les Antilles, et particulièrement l'adventisme antillais, seraient un microcosme structuré différemment. L'universalisme énoncé dans votre commentaire s'applique aussi là.
    Ce constat d'un rapport entre contexte social (dynamique) et pratiques religieuses est un lien qui, pour revenir au début de votre dernier commentaire, permet à la théologie de mieux saisir les textes. Elle lui donne même une actualité, une réalité. De fait, garder la conscience de l'influence du milieu et des contingences historiques, fait de la sociologie comme je le crois, la cheville ouvrière entre réalité et idéaltype théologique. Comment paitre des brebis sans connaitre la nature même du sol, de l'herbe dont elles disposent ! Là est l'apport de la sociologie.
    Ce regard des sciences sociales explique d'ailleurs fort bien les échecs et les succès de l'adventisme dans certains terrains. Ainsi, les pasteurs adventistes qui ont une formation poussée en sociologie notent cet incontestable apport.
    Je termine avec un autre exemple: La bibliographie officielle du Concours 2008 du Capes Créole diffusée le 17 mai dernier regorge de références qui font le lien énuméré ici, implicitement, ou explicitement.

  • Il y a bien-sûr un apport africain incontestable dans le vécu des adventistes antillais (que nous partageons avec les autres Caribbéens, noirs Américains et Brésiliens notamment): une certaine spontanéïté et expressivité dans l'exercice du culte, le cri africain (un cri du fonds de l'âme pour demander l'aide de Dieu), le rythme dans la musique, une tradition du sabbat de plusieurs millénaires notamment en Ethiopie et au Ghana, une certaine oralité dans la prédication, le goût pour les histoires (notamment de l'Ancien Testament). Je pense au livre de Charles Bradford, "Sabbath Roots: the African Connection" et aux recherches des théologiens d'Oakwood College.

    J'ai seulement souligné que les pratiques magico-religieuses de l'Afrique (ou de n'importe quelle autre partie du monde) ne font pas partie de l'héritage spirituel des adventistes - Antillais.

    Il y a une bonne raison à cela. Les adventistes ont veillé (probablement plus que les autres dénominations protestantes) à ne pas transiger ce point. Les influences religieuses sur l'adventisme ont été nombreuses (le piétisme, l'anabaptisme, le méthodisme, le baptisme, Martin Luther) mais elles ont toujours été sélectives.

    Même chose sur le plan culturel. D'un point de vue adventiste (et biblique), toutes les cultures ont des parcelles de vérité et des pratiques pécheresses. Il ne s'agit pas d'adopter sans discrimination, d'absorber ou de mélanger (le syncrétisme) à l'adventisme toutes les pratiques de l'environnement immédiat ou plus lointain. Tout passe par la moulinette de la réflexion biblique.

    Je me réjouis au passage de l'évolution de la sociologie sur la réalité spirituelle. On va peut-être enfin examiner plus attentivement les explications souvent ridiculées des savants et des théologiens qui ne sont pas évolutionistes ou agnostiques.

  • Incontestablement c'est un fait. Il faut dire qu'aujourd'hui la sociologie du fait religieux n'est pas animé par des anti-religieux. C'est un évolution forte et intéressante qui permet d'analyser sans présupposés négatifs les pratiques et représentations sociales. Là est un apport fondamental, sans aucune compromission.
    Cela me réconforte dans l'idée qu'il faille pour analyser le religieux en sciences humaines "des chercheurs de l'intérieur", qui connaissent intimement les groupes aux côtés d'autres qui en ont une vison externe. Les critiques voient là un manque d'objectivité, mais moi je vois juste une objectivation. Et cela nous le devons à la construction d'un regard en sciences humaines débarrassé des soupçons. Et c'est mieux ainsi, quitte à passer pour de mauvais chercheurs. L'objet (ici l'adventisme par exemple) est respecté et étudié. C'est ainsi dans d'autres domaines (politiques, éducation...) pourquoi pas dans la religion ?
    Au plaisir de vous relire

  • Votre recherche "de l'intérieur" est une méthode pertinente qui fait justice au sujet étudié.

    De temps à autre, les adventistes déplorent des approximations et des contresens de la part d'observateurs externes qui n'ont pas pris la peine de bien étudier le mouvement.

    Il faut donc saluer ce travail de longue haleine.

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