Guido avait mis sur la piste l’étudiant que j’étais. Je voyais déjà le chapitre de thèse et les articles qui en suivraient. Il fallait simplement « importer » des revues adventistes. Puis, comparer les sommaires. Et ensuite regrouper les revues qui se ressemblent. Voilà qui devrait être simple, surtout qu’il s’agit quand même uniquement de versions locales, pays par pays, de la Revue Adventiste ! Le travail serait ainsi bouclé. J’imaginais arriver à démontrer, statistiques à l’appuie, taux de récurrence créé, qu’en gros les adventistes avaient dans tous les pays un regard identique, forgé par leur patrimoine (histoire de l’Eglise, théologie, Institutions socialisatrices…). Certainement il y aurait des variations régionales mais celles-ci resteraient des variations et non des différences. Avec quand même le mythe de la facilité je me suis lancé. Du Nord, facilement ont peut obtenir des revues lusophones et hispanophones. J’ai pu obtenir une série de Revue en provenance de Roumanie. Des USA j’en avais trop. Dès Antilles, La Sentinelle, puis le Reflet, et La Revue furent des publications que j’ai cumulées. J’avais veillé à ce que toutes les revues soient sur la même période.
Venons-en aux « conclusions ». Premièrement ce fut le « choc » (il faut pas exagérer non plus) pour le jeune étudiant que j'étais et qui sans le savoir avait une vision trop simpliste de l'adventisme. Les Revues qui étaient identiques correspondaient généralement à des « semaines de prières » ou autres manifestations internationales organisées par la Conférence générale. Mais il s'agit d'une, deux, trois, voir quatre Revue par an ? Et les autres.
Il me semble possible, encore aujourd'hui de catégoriser les Revues, mais pas comme je le pensais. Les Revues étaient toutes un savant équilibre entre une orientation générale conforme à la Conférence générale (centre de décision des adventistes), mais surtout un lieu où des centres d'intérêts locaux et des points de vues différents, voire opposés entre revues allaient se manifester. Les Revues devaient êter abordées à partir des préoccupations et cultures locales. Elles s'appelaient toutes Revue Adventiste, mais parfois c'était le seul point commun. Un exemple : les Revues américaines étaient centrées sur les problématiques évangéliques dans un ton très déterminés. En France elle était plutôt orientée vers la compréhension de phénomènes sociaux pour aider les membres à se construire une opinion. Dans les publications antillaises se sont essentiellement des points de doctrines qui sont présentés pour par la suite conduire le membre à adopter une conduite bien déterminée. Il y a là une différence fondamentale dans l'éthique, l'épistémologie même des publications antillaises et hexagonales. La connaissance est édictée dans les publications antillaises, alors qu'elle est proposée dans la Revue Adventiste présente dans l'Hexagone (elle est aussi disponible dans des pays limitrophes).
Dans les publications roumaines, l'idée de survie était très forte. C'est ce que j'ai déduit des traductions. Les thèmes abordés pouvaient être compris que si le lecteur maîtrisait entre les lignes les questions sociales et politiques roumaines.
Que retenir : il n'y a pas une Revue, mais des Revues adventistes. Elles sont des déclinaisons locales faites dans les Unions (l'Union est un niveau administratif adventiste). Dans leurs contenus elles ne sont pas que la simple expression de la théologie adventiste ou des orientations de la Conférence générale. Elles sont des constructions essentiellement locales qui véhiculent les problématiques locales. En France par exemple, où il y a une grande confiance en l'individu (ici le membre) on n'imagine pas un article dont le but est de dire comment faire, mais plutôt comment se penser pour que chaque individu développe une pratique en toute conscience. Tel est moins le cas aux Antilles où des publications indiquent l'interdiction de porter des bijoux, de danser, etc. C'est une opposition majeure qui se comprend au travers des cultures locales et dont la Revue n'est finalement, en grande partie, qu'un écho.
Comme il y a plusieurs Revues disons qu'il y a des adventismes. La Revue le démontre, l'Eglise Adventiste est un espace de diversités. Certaines peuvent avoir des logiques surprenantes pour une autre. Mais là est une contrepartie inévitable que doit assumer une organisation religieuse présente dans plus de 200 pays.