Continuons notre rétrospectice sélective de grèves en Guadeloupe pour mieux comprendre la dernière grève de 44 jours mené par le LKP.
Le mouvement de mars 1975 s'épuise. Les grévistes sont moins mobilisés. Tout semble indiquer la fin du mouvement sans que les revendications soient satisfaites. C'est là que l'imprévisible se produit et entraînera un tournant inespéré pour les grévistes. Un homme, le Père Chérubin Céleste entame une grève de la faim pour que les demandes des grévistes soient satisfaites. Le père C.C. n'est pas un inconnu. Il a soutenu la grève de 1971 et a poussé l'Eglise Catholique à marquer son intérêt pour la lutte sociale des ouvriers. Le Père C. C. a u discours politique construit. Il incrimine les usiniers et l'Etat, complices de laisser la situation sociale guadeloupéenne se dépérir.
Le 31 mars 1975, dimanche de Pâques, la Chapelle était devenue trop petite pour accueillir les milliers de personnes ayant fait le déplacement pour soutenir C. C. Le pouvoir décide d’intervenir en mobilisant les CRS. Le lendemain, lundi 31 mars, au petit matin, la Chapelle est entièrement encerclée alors que se trouvent rassemblés autour du Père CELESTE plusieurs centaines de personnes. A 6 heures, l’assaut est donné. Asphyxiés et matraqués, les manifestants et les familles riveraines doivent évacuer les lieux et se disperser dans la nature. Le Père Chérubin CELESTE sera extrait de la Chapelle et emmené dans un lieu secret tout en continuant à refuser de s’alimenter. Cette intervention dans un espace religieux entraina la réprobation de l’opinion publique localement et au-delà de la Guadeloupe. Devant le tollé suscité les négociations reprirent. Constatant le dialogue renoué le Père C. C. se réalimenta. Les négociations furent rapides et le salaire des ouvriers agricoles est aligné sur celui des ouvriers d’usines et augmente de 20%. De son côté le prix de la tonne de canne est augmenté de 40% et fixé en fonction du prix de revient, même si la méthode de calcul en fonction de la richesse était encore maintenue.
Avec la grève de 1975 le mouvement social antillais obtint une victoire inespérée. Elle rappela l’importance de la lutte mais surtout de l’implication de l’ensemble des acteurs, dont le religieux. Sans le vouloir un Père Catholique (peut être moins l’Eglise Catholique) apparaissait comme une voie possible de progrès social en consonance avec les luttes sociales.
Les années 80 sont également des années de luttes intenses mais le contexte de leur déroulement à changer. L’arrivée de la gauche au pouvoir et surtout le fort sentiment que les luttes sociales n’aboutissent pas à de réelles avancées, vont entraîner vers une nouvelle forme de lutte qui marquera radicalement les luttes sociales antillaises. Nous y reviendrons dans la prochaine note… A suivre.