A l'initiative de Maître Dominique Kounkou j'ai participé mardi 22 mars au colloque « Réveil du religieux, éveil de la société » qui s'est déroulé à Paris. J'aurai pu relayer l'information mais j'avoue que pris par de nombreuses autres activités j'ai négligé le blog et plus précisément de transmettre plusieurs informations dont celle-ci. J'étais présent que l'après-midi et je n'ai pas pu profiter des interventions matinales autour de Haïti. L'après midi a été porté par des thématiques où s'entrecroisent droit et sociologie. Parmi les intervenants trois universitaires, Régis Dericquebourg, Laburthe Torla et Fabrice Desplan. Ajoutons la présence de Me Gérard Ducrey dont l'oeil expert est d'une richesse exaltante.
Régis Dericquebourg a fait une sociologie de l'évolution de champs professionnels de la psychothérapie et montré comment la nouvelle législation qui laisse une grande place aux médecins et psychiatres, résulte du poids social, de l'influence, de ces professions au détriment d'autres, plus légitimes sur la question comme les psychologues. Sa présentation basée sur des éléments factuels organisés chronologiquement revient sur la stratégie de psychologues qui s'appuient sur une sémantique et des actions « anti-sectes » afin de crédibiliser le souhait d'être une profession qui encadre la psychothérapie. Dericquebourg montre que la clef de la psychanalyse et de la psychothérapie est, à des degrés différents mais importants, la réalisation d'une analyse de l'analyste. Ce dernier doit faire sa propre psychothérapie. Cet élément épistémologique sujet à discussion mais présent n'a pas été mobilisé dans le lobbying auprès des parlementaires par les professions instituées (psychologues et psychiatres). Bien leur ait pris parce que ce critère légitimerait les psychothérapeutes ! Mais surtout Dericquebourg démontre que dans le jeu d'influence entre professionnels dont le but est d'avoir la main mise sur le statut de psychothérapeutre, "les psychologues avaient participé à l'élimination des psychothérapeutes en validant théoriquement la notion de dérive sectaire mais qu'il n'en n'avaient pas profité puisqu'ils sont relégués à une obligation de formation complémentaire comme les médecins qui eux font peu de psychologie dans leurs études".
Dans un autre registre, j'ai continué une réflexion entamée dans le dernier numéro de Conscience et Liberté autour de la diffamation de groupes religieux. A partir de la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme j'ai voulu montrer que le droit Européen tente d'imposer une lecture des minorités religieuses loin de la stigmatisation sociale. CE n'est pas une tendance uniforme. Cependant les arrêts de la Cour prennent de la distance avec les positions admises jusqu'à présent du droit dans nombres de pays pour tenter de rééquilibrer les échanges en faveur de groupes qui jusqu'à présent sont perçus comme des menaces alors qu'ils composent, comme d'autres, le tissus social sans actes subversifs.
Maitre Gérard Ducrey, qui n'est plus à présenter, a insisté sur l'évolution des arrêtes de la CourEDH dont le dernier sur les crucifix en Italie est de son avis majeur ouvrant des portes à la liberté religieuse et de croyance. Réaffirmant mon propos, Me G. Ducrey note toutefois la difficulté procédurale à se faire entendre de la Cour. Il insiste particulièrement sur les interactions entre politique et CourEDH. De fait, il appelle à la vigilance sur le renouvèlement de sièges au sein de la CourEDH, en espérant que cela n'entrave pas une dynamique bien encrée de la Cour en faveur des libertés de religions et de croyances.
La conclusion de la journée réalisée par le Professeur Laburthe Torla qui rappelle la complexité de la place du religieux aujourd'hui. Il insiste sur les difficultés du législateur à accepter cette complexité et à vouloir la simplifier autours d'intérêts. Le religieux est un élément du dynamisme social qu'il faut approcher en lui laissant toute sa complexité. Pour celui qui est un des plus grand anthropologue français de la religion c'est une évidence mise à mal qu'il faut maintenant reconstruire.
Les interventions formeront un ouvrage qui sortira avant la fin de l'année afin de permettre à tous un prolongement des réflexions qui y seront proposées.